Thomas carrere terres du sud

Rencontre avec Thomas Carrere,
viticulteur à Saint-Laurent-du-Plan (33)

À 35 ans et déjà 10 ans d'activité à son compte, Thomas Carrere cultive ses vignes à une cinquantaine de kilomètres au sud de Bordeaux. Dans un contexte difficile pour le vignoble bordelais, accompagné par Terres du Sud, il pratique une viticulture responsable et pragmatique, tournée vers l'avenir.

J’ai choisi de cultiver le lien entre la vigne et la biodiversité

PASSIONNÉ par son métier, Thomas Carrere a grandi sur les coteaux de la Garonne. « Je suis tombé dans la cuve tout petit ! » , s’amuse-t-il. Ses grands-parents possédaient 10 hectares de vignes à Saint-Laurent-du-Plan, cultivés en fermage à leur départ en retraite. En 2013, pour éviter la vente des parcelles familiales, Thomas se lance dans l’aventure : « J’étais alors salarié d’une exploitation viticole après mon bac professionnel« , précise-t-il. Le jeune agriculteur se tourne notamment vers Terres du Sud : « Mes grands-parents adhéraient déjà à Terres du Sud. J’ai naturellement sollicité la coopérative, ça m’a fait gagner du temps au moment de mon installation. »

Viticulture raisonnée et agriculture moderne

Depuis lors, il est épaulé par Terres du Sud sur différents aspects, dont le suivi de ses vignes et du sol, comme l’explique Mathieu Cachau, son technicien référent : « On assure que le sol est préservé, que la plante se défende le mieux possible pour un fruit de qualité optimale. On apporte une vision globale, en particulier pour les sols et leur équilibre. » Un accompagnement qui encourage aussi le développement d’une production « propre » et transparente. Thomas Carrere a d’ailleurs fait le choix d’une viticulture raisonnée, respectueuse de l’environnement, qui privilégie les solutions alternatives de biocontrôle. « Pour moi, c’est du bon sens » , affirme-t-il. D’ailleurs, il s’est engagé depuis plusieurs années dans une double certification : HVE 3* et Terra Vitis**. « Le cahier des charges est contraignant, mais ce sont des pratiques qui me parlent, qui touchent autant la biodiversité qu’aux aspects humains, la formation par exemple. Et puis ça permet aussi de se démarquer aux yeux des consommateurs » , explique le viticulteur dont la certification est renouvelée annuellement. Une démarche qui garantit aussi la traçabilité de sa récolte, vinifiée en coopérative agricole.

Pratiques vertueuses et innovation dans un contexte difficile

Avec des rendements annuels moyens entre 1 500 et 1 800 hectolitres, la propriété de Thomas Carrere conserve une taille humaine et permet à l’agriculteur de maîtriser ses choix tout en garantissant sa viabilité économique. Dernier exemple en date de ce délicat équilibre à trouver entre pérennité économique, innovation et protection environnementale ? « Je ne désherbe plus certaines parcelles. J’y vais progressivement, notamment parce qu’en période de sécheresse, cela accentue la faiblesse des rendements. Il faut innover mais le faire par étapes, pour ne pas se mettre en péril … d’autant que la viticulture girondine n’est pas au meilleur de sa forme ! » , reconnaît-il. Crise du Covid, fermeture du marché chinois – débouché majeur du vin bordelais – et campagnes de santé publique ont, selon lui, fortement impacté la consommation de vin ces 4 dernières années. « Ce contexte associé aux changements climatiques sont autant de signaux, de déclencheurs pour innover dans nos pratiques et tenir compte de notre environnement » , ajoute-t-il.

L’installation de ruches : une expérimentation fertile

Pour Terres du Sud, agir sur la biodiversité est un levier propice au développement de productions saines et rentables. « Nous avons cherché une solution simple, concrète, à forte image positive générant un bénéfice économique, environnemental, sociétal et technique, à proposer aux vignerons et arboriculteurs du groupe, favorisant la biodiversité. Dans cette perspective, les pollinisateurs, et les abeilles en particulier, ont été retenus » , détaille Mathieu Cachau, initiateur d’un groupe de travail de la coopérative autour de l’apiculture. Préoccupations environnementales et curiosité sont – de son aveu – les motivations qui ont poussé Thomas Carrere à y participer « C’est une activité qui m’a toujours passionné. J’ai installé ma 1er ruche en 2020 suite à cette initiative ; aujourd’hui j’en ai 5 » précise-t-il. Pour la coopérative – qui a accompagné la 1re année la fourniture de l’équipement et des essaims, la formation et le suivi – l’installation de ruches chez les agriculteurs recouvre de nombreux avantages : amélioration des rendements grâce à la pollinisation décuplée, incitation à changer le paysage (plantations mellifères) et ses pratiques, nouveaux débouchés commerciaux éventuels par la vente de miel… Et un fort impact sur leur image, comme le confirme le viticulteur : « Le gain en termes de communication avec le voisinage est certain. Cela permet d’expliquer notre activité, de susciter l’intérêt et de changer le regard des gens. Ils se rendent compte que si les abeilles installées sur les parcelles se portent bien, c’est bien que nos pratiques ne sont pas si impactantes ! » Une démarche qui semble porter ses fruits à l’échelle du groupe de travail : « C’est une clé d’entrée vers une évolution progressive des mentalités et une approche plus globale. Les producteurs mettent un pied dans la biodiversité du sol par exemple et de manière plus générale leur proposer une approche plus globale de conseil sur l’exploitation » , commente le technicien.

Viticulteur, un métier en mutation ?

Après 10 ans de pratique à son actif, toujours ouvert à de nouvelles initiatives, le Girondin n’en demeure pas moins prudent. « Vu la conjoncture, mon objectif, c’est de poursuivre ma démarche environnementale et de préserver l’existant » , affirme-t-il. « En comparaison avec le travail dans les vignes à l’époque de mes grands-parents, je reconnais volontiers que c’est moins pénible aujourd’hui, grâce aux innovations. Par contre, le travail administratif est complexifié, il faut y consacrer de plus en plus de temps… on est devenu chefs d’exploitation » , déclare Thomas Carrere. Une diversité de tâches qui, d’après lui, fait aussi le sel de son métier… et mérite de ne pas s’essouffler. « J’ai vraiment à cœur de transmettre ce que je sais et mon amour de la viticulture » , conclut-il.

 

*HVE, pour Haute Valeur Environnementale : cette mention garantit que les pratiques agricoles utilisées sur l’ensemble d’une exploitation préservent l’écosystème naturel. La démarche HVE, volontaire, s’appuie sur des indicateurs, évalués tous les 18 mois, dans 4 domaines : préservation de la biodiversité, stratégie phytosanitaire, gestion de la fertilisation et de l’irrigation. 
** Terra Vitis : cette certification est spécifique à la viticulture et s’appuie sur un cahier des charges exigeant. Ce dernier garantit l’engagement du viticulteur dans 3 grands domaines : préservation de l’environnement, responsabilité sociétale et durabilité économique.

L’exploitation de Thomas Carrere en bref :

  • 35 hectares de vignes, répartis sur 3 communes limitrophes
  • une production sous AOC : Bordeaux, Bordeaux supérieur et Côtes de Bordeaux Saint-Macaire (blanc)
  • une vinification en cave coopérative
  • deux certifications : HVE (niveau 3) et Terra Vitis
  • 5 ruches installées sur la propriété, à proximité des vignes