Gérald Dupuy, agriculteur groupe Terres du Sud

Rencontre avec Gérald Dupuy,
producteur de céréales semences à Taillebourg (47)

On n'est pas du genre à rouler des mécaniques, chez les Dupuy. Certes, la taille de leur exploitation, nichée sur la rive droite de la fertile vallée de Garonne, est plus que confortable puisqu’elle avoisine les 500 hectares. Mais ce sont trois familles qui vivent dessus ! À 56 ans, Gérald Dupuy a, en effet, eu la chance de voir ses deux fils s'installer à ses côtés. Avec son épouse, ils sont donc quatre associés à faire perdurer une ferme qui tient bon depuis quatre générations. Après un premier virage céréalier il y a 30 ans, les Dupuy démontrent qu’ils savent humer l’air du temps en se lançant dans la culture des semences, maïs et tournesol, avec l’appui de Terres du Sud.

J’ai choisi de me diversifier dans la semence pour assurer l’avenir de nos trois familles

Interview

À quoi ressemblait l’exploitation familiale lorsque vous l’avez reprise ?

IL Y AVAIT de la tomate, du tabac, le petit carré de vigne, de l’élevage et déjà des céréales, bien sûr. Ce qu’on retrouvait habituellement dans une exploitation en polyculture de la vallée de la Garonne.

L’exploitation a bien évolué depuis ?

Effectivement ! Il y a une trentaine d’années, on a arrêté la culture du tabac, pourtant historique dans la vallée de la Garonne, et mon père a choisi de se diversifier dans les travaux agricoles. Côté production, on a fait évoluer l’exploitation pour nous recentrer sur les céréales et les cultures pour l’industrie agroalimentaire, comme les haricots verts ou le maïs doux. Et depuis deux ans, on s’est lancé dans le maïs semences et le tournesol semences.

Qu’est-ce qui a motivé votre choix pour les semences ?

Il fallait trouver de nouveaux revenus en raison de l’installation de mes deux fils. Même si on a de bons rendements dans la vallée de la Garonne par rapport aux coteaux, le prix des céréales est très variable. Il fallait faire autre chose, trouver de nouveaux débouchés plus stables et plus rémunérateurs, ce qui nous a poussé à nous diversifier avec le maïs semences et le tournesol semences.

Vous avez bénéficié des conseils de Terres du Sud pour faire ce choix ?

Oui, on connaissait un peu ce type de cultures, et on savait que Terres du Sud les proposait. On les a donc questionnés et on a choisi de faire un essai sur une petite surface d’une quinzaine d’hectares en 2020. Cette année, on a développé cette activité avec près de 40 hectares. On a aussi investi dans une machine pour castrer le maïs afin d’être autonome sur l’exploitation.

La production de semences répond à votre objectif de débouchés plus rémunérateurs ?

Nous sommes nouveaux dans ce domaine donc il nous faudrait plus de recul pour l’affirmer. Normalement c’est plus rémunérateur. Sauf que cette année, pour le moment, le prix des céréales est bien remonté. Vu nos rendements, la rémunération entre maïs classique et maïs semences risque d’être à peu près la même cette année. Mais on n’a pas toujours les mêmes prix pour les céréales classiques et, si leurs prix chutent à nouveau, on espère que les semences nous apporteront cette sécurité au niveau de la rémunération.

Mais en contrepartie, la culture de semences est-elle plus contraignante ?

Il faut être très appliqué et méticuleux. Si j’étais resté seul, je ne me serais pas impliqué dans cette culture. La présence de mes deux fils a été décisive. Il y a des protocoles de semis à respecter, pour échelonner les semis mâles à quelques jours d’intervalles puis semer les femelles. Il faut savoir jouer avec la météo, la préparation du terrain, ce n’est pas évident de réussir la levée. Et ensuite il ne faut pas rater la fécondation en période estivale. Heureusement, on bénéficie de l’appui technique du groupe Terres du Sud.

Y a t’il d’autres contraintes ?

Pour garder la semence la plus pure possible, il faut être isolé à plus de 200 mètres d’une culture classique pour qu’elle n’interfère pas dans la fertilisation. Jusqu’à présent on ne pouvait pas le faire, mais avec l’agrandissement de l’exploitation pour installer mon deuxième garçon, cela nous a permis d’avoir des parcelles isolées et de cultiver ce maïs semences. On a par ailleurs investi dans une machine à castrer le maïs semences.

L’utilisation de la machine à castrer était obligatoire ?

Oui, car pour le maïs fertile, il faut passer deux ou trois fois dans la parcelle pour couper les fleurs femelles, et il faut être très réactif. Avoir la machine sur place nous permet de pouvoir réagir dans l’heure. Même si cela n’enlève pas le besoin de main-d’œuvre, puisqu’il faut arracher toutes les fleurs de la plante que la machine n’a pas enlevées. Là encore, cela demande beaucoup de précision en termes d’agenda pour avoir le personnel disponible presque à la journée voulue. C’est un suivi au jour le jour, car la plante doit être parfaite.

Et pour vendre vos semences, vous faites comment ?

Terres du Sud réalise notre suivi technique, le cahier des charges et nous accompagne dans la production, puis nos semences sont commercialisées par l’intermédiaire de LIDEA, dont Terres du Sud est d’ailleurs actionnaire.

C’est important pour vous que les agriculteurs français produisent leurs semences qu’ils vont réutiliser par la suite ?

Oui, parce que nous avons une très bonne qualité de semences produites en France. On le constate quand on sème du maïs fertile. Quand c’est de la semence produite en France, la qualité est au rendez-vous dans les sacs pour les semis. Ce qui n’est pas forcément le cas lorsque les semences viennent des pays de l’Est par exemple.
Et puis la production de semences est très importante pour l’agriculture française, qui s’assure ainsi son propre avenir en maîtrisant l’ensemble de la filière, comme c’est le cas pour le maïs. Cela fait partie de la fameuse souveraineté alimentaire dont on entend beaucoup parler, et qu’on souhaiterait voir se développer.

Ce que vous dites là est un gage d’avenir pour vos deux garçons qui viennent de s’installer ?

C’est certain, même si l’agriculture est un métier qui demande beaucoup d’investissement personnel, en compétences diverses et variées mais aussi en temps. On voit bien que le renouvellement des générations d’agriculteurs devient de plus en plus compliqué. C’est pour cela que je ne roule pas des mécaniques face aux exploitations qui sont plus petites que la nôtre ou orientées vers d’autres formes d’agriculture. Il nous faut de tout pour faire avancer l’agriculture française, et notre souveraineté alimentaire en dépend.

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