

Rencontre avec Stéphane Nauche, éleveur de canards mais pas que… au Chalard en Haute-Vienne (87)
Dans la campagne vallonnée, aux portes du Périgord vert, juché sur une colline, le bâtiment d'élevage de Stéphane Nauche domine le paysage alentour. Depuis peu ce ne sont pas des canetons qui profitent comme à l'accoutumée de l'ambiance parfaitement maîtrisée du lieu mais des poussins qui très vite deviendront grands. En effet, grâce au mouvement La Ferme ! le bâtiment a été aménagé pour le rendre polyvalent. Un atout indéniable pour préserver le revenu de l'éleveur qui ne cache pas son enthousiasme à l'idée de relever ce nouveau défi.
J’ai choisi de diversifier mon élevage pour répondre aux demandes du marché
L’ÉLEVAGE, STÉPHANE est tombé dedans quand il était petit. À dix ans à peine, avec sa sœur, ils aidaient déjà leurs parents à s’occuper des poulets de la ferme. En construisant son projet de reprise de l’exploitation familiale, Stéphane Nauche y a évidemment inclus les animaux. Une manière traditionnelle dans le coin d’exploiter des terres pas toujours faciles à cultiver. S’il élève d’ordinaire des canards sous label IGP Périgord, il a aussi une cinquantaine de vaches allaitantes, de race limousine et environ 90 hectares répartis entre prairie et cultures céréalières.
Des bâtiments plus polyvalents pour s’adapter à la demande
Son bâtiment de 2000 m², Stéphane l’a construit en 2020 avec Terres du Sud pour accueillir 10000 canards par bande, soit plus de 30000 canards par an, mais déjà il avait été conçu pour être modulable.
Matériaux faciles d’entretien, lumière naturelle pour le bien-être des animaux, pailleuse automatique, tout y est pensé pour améliorer le confort des bêtes et le travail de l’agriculteur. Une console numérique connectée permet de gérer l’ambiance intérieure : température, humidité, ventilation, tout est paramétrable depuis le bâtiment mais aussi depuis le téléphone portable ou l’ordinateur de la maison. Même Eric Sarlandie, le technicien Terres du Sud qui accompagne Stéphane y a accès. On peut surtout y enregistrer des profils, qui permettent en un seul clic de passer d’une ambiance à une autre en fonction des besoins naturels de l’espèce qui s’y trouve.
Lorsqu’en fin d’année 2024, Eric lui propose de lancer un essai d’élevage de poulets origine France dans son bâtiment, Stéphane n’hésite pas longtemps. « L’enjeu pour moi c’est de rentabiliser le bâtiment au maximum, qu’il soit plein à l’année », explique l’éleveur. Car la production française de canards gras a repris, à tel point qu’elle est devenue excédentaire. Pour ne pas saturer davantage le marché, Terres du Sud a réduit les volumes produits, allongeant de fait les périodes de vide sanitaire chez les producteurs de canards. Dans le même temps, la demande en volaille française a augmenté et les coûts de construction de nouveaux bâtiments d’élevage ont explosé. Il n’en fallait pas plus pour que la conclusion s’impose : les bâtiments comme les hommes doivent être polyvalents, agiles et réactifs pour répondre au plus près des besoins des marchés.

Un test grandeur nature
Profitant d’un vide sanitaire, l’équipement du bâtiment a débuté fin janvier et a duré à peine une semaine. Une chaîne d’alimentation et une ligne de pipettes spécifiques ainsi qu’un peson automatique ont été installés pour s’assurer que les poussins évoluent correctement. Le coût des travaux – 15 000€ au total – a été financé par la caisse d’investissement du Mouvement La Ferme ! dans le but de valider la pertinence de ce modèle.
Le 3 février, Stéphane Nauche accueillait 36 000 poussins au lieu des 10 000 canetons habituels. « Leur comportement est très différent, la 1ère semaine les canards restent groupés et ne font que des déplacements longitudinaux. Dès le départ les poussins, eux, occupent tout l’espace », s’étonne-t-il.
CE N’EST PAS LA seule différence, alors qu’une bande de canards dure environ 12 semaines, les poulets, eux, vont rester 35 jours durant lesquels ils vont passer de 40 g à 2 kg. Pour assurer cette croissance, les 15 premiers jours sont essentiels, c’est aussi le moment où les poussins sont les plus fragiles. Ces bâtiments sont très adaptés car l’ambiance y est parfaitement maîtrisée. « Les poussins souffrent des variations brutales, l’atmosphère doit être contrôlée de manière très linéaire » précise Stéphane.
Des résultats très concluants
Pour favoriser la réussite de cet essai, la densité a été réduite de 20 à 18 poulets / m², il n’en reste pas moins que l’opération est un succès. Le bilan est proche des meilleures performances de notre groupement de producteurs, ce qui est très encourageant pour la suite. Cela va permettre d’augmenter la densité et d’envisager la polyvalence chez d’autres éleveurs. « Quand on voit que derrière les investissements les objectifs sont atteints, on est forcément contents. Ça ouvre des perspectives pour l’avenir », se réjouit Eric Sarlandie.
L’idée serait de profiter des conditions favorables au mode d’élevage, en produisant du poulet pendant les périodes plus froides de décembre à avril et du canard pendant les beaux jours de mai à novembre tout en répondant à la demande en canard gras plus importante au moment des fêtes. Stéphane, lui, attend de calculer la rentabilité sur une année complète car les coûts comme les contraintes administratives ne sont pas exactement les mêmes selon l’espèce. En attendant, il poursuit l’aventure en enchaînant une deuxième bande de poulets avec encore plus d’enthousiasme. « C’est sûr que c’était un petit défi, mais j’aime ce genre de challenge et puis c’est valorisant quand on réussit d’autres productions », conclut Stéphane.